Le syndicat CGT de la source Perrier
Le front populaire de 1936 a fait naître de grands espoirs d’avancées sociales.
Le territoire du sud du département du Gard, marqué par des luttes des travailleurs agricoles, dont l’usine des Bouillens se situe, a une activité syndicale riche.
C’est cette année de 1936, que quelques travailleurs de l’usine Perrier, créent
le syndicat CGT des employés et ouvriers de la compagnie de la source Perrier- les Bouillens ».
Très vite, la grande majorité des travailleurs adhèrent à la CGT. Dès l’année 1937, 85 % des salariés sont adhérents à la CGT, instaurant un rapport de force qui malgré les années et les intimidations se maintiendra. Les directions successives ne l’entendent pas comme ça, et tout est mis en œuvre, par la répression, la division, la discrimination, la délation, le chantage, pour affaiblir voire faire disparaître le syndicat. Les grèves se succèdent, malgré quelques « jaunes » ou collaborateurs zélés qui ont pour mission de faire capoter ces mouvements revendicatifs légitimes : cadences infernales, oppression…
Pendant la guerre de 1939 - 1945, le syndicat perdure dans la clandestinité. Les hommes étant appelés pour combattre, la direction fait appel aux femmes et aux enfants pour les remplacer.
A l’issue de la guerre, le programme du Conseil National de la Résistance (CNR), créera les premiers outils de surveillance et de relations sociales dans l’entreprise : Les comités d’entreprise qui deviennent une avancée considérable pour les salariés et une épine dans le pied du patronat, qui depuis ne cesse d’en abaisser l’influence et les compétences.
Celui de la source Perrier, est né le 6 juillet 1945 (et prend fin dans sa forme initiale en 2019 pour devenir sous l’ère Macron le CSE).
L’après guerre, bien que l’audience de la CGT ne s’affaiblisse pas au sein de l’entreprise, est une période où toutes les attaques pour la mettre en mal sont permises. Parfois même avec la complicité de syndicats maison qui se révèlent sous l’étiquette FO.
En 1965, une nouvelle équipe dirige le syndicat CGT, et obtient la majorité aux élections. Elle s’appuie sur les prérogatives économiques du CE, pour en faire un outil de lutte. La direction voit l’arrivée de ces dirigeants d’un mauvais œil les menaces de licenciement pour des raisons plus ou moins vagues et concrètes. L’inspecteur du travail refusera les licenciements.
En mai 1968, la CGT de la source Perrier s’inscrit pleinement dans le mouvement revendicatif, et occupe l’usine plusieurs semaines. Sont obtenus à l’issue des grèves : 10% d’AG sur les salaires, 20% sur la prime de vacances, prime de poste, jours fériés payés, une partie de la pause payée, prime de transports, prime de fin d’année, réduction du temps de travail….
De 1970 à 1974, s’engage un long conflit. La direction n’a pas digéré les avancées de mai 1968 et fait un blocage à toute avancée sociale.
La CFDT et la CGT s’unissent dans la grève et l’occupation de l’usine. La direction traduit devant les tribunaux 8 élus CGT, 2 CFDT et 2 ouvriers, pour faute commise durant la grève. Malgré l’appui du syndicat autonome (qui deviendra encore FO) fait d’anti CGT, la direction se voit confronter à une solidarité bien au-delà des murs de l’entreprise et une médiation du conflit.
Une plainte est déposée contre le PDG pour violation des droits des représentants du personnel. La procédure longue verra la prononciation « des arrêts Perrier » qui feront jurisprudence pour la protection des élus et mandatés. La CGT sort renforcée de ce long conflit.
Les années 70/80, sont des années fastes industriellement avec la création de la verrerie du Languedoc. Socialement, de nouvelles avancées sont obtenues, notamment à travers une procédure judiciaire qui permettra une transaction et offrira des avantages conséquents et extra légaux au CE.
En 1990, l’affaire benzène marque les esprits. Des traces infimes dans une bouteille et tout s’effondre. L’empire Perrier est affaiblit et l’OPA qui suivra verra Nestlé en 1991 prendre contrôle de la source.
Les craintes émises par la CGT se font jour rapidement, et malgré la mobilisation effective du personnel et les actions en tout genre, la casse sociale se concrétise.
Depuis 1993 Nestlé n’a de cesse de supprimer des emplois, des services, des outils, et voit la production et les ventes diminuer drastiquement…
Il faudra attendre 2010, pour connaître à nouveau l’espoir de développement.
La multinationale, change de stratégie, et le besoin de volumes se fait sentir. La CGT s’inscrit dans ce changement d’orientation et à la table de négociation s’y présente non plus sur la défensive comme ce fut le cas durant 20 années, mais sur l’offensive.
La direction affiche sa volonté de « moderniser » les lignes de productions mais surtout les méthodes de travail. La CGT comprend que les nouvelles méthodes n’apporteront rien de bon pour le personnel, mais qu’il y a peut être des choses à négocier. L’emploi, les salaires, le volontariat pour des rythmes nouveaux atypiques, sont autant de pré requis à tout nouveau projet apporté par la direction.
Depuis 1946, la CGT a porté des valeurs qui lui ont permis d’être encore présente, d’être encore majoritaire et de recueillir la confiance des salariés.
Les femmes et hommes ont changé, les statuts dans l’entreprise ont évolué, mais la CGT reste le moyen de protection des droits de tout le personnel, quel que soit son métier, sa fonction.
A travers ces longues décennies, les directions quelles qu’elles soient ont toujours eu comme objectif, de se débarrasser une fois pour toute de la CGT. Aidées pour cela, par parfois des proches collaborateurs, mais par souvent des anti CGT, jaloux, opportunistes, rancuniers que l’on a trouvé sous des bannières syndicales qui pouvaient changer au fil des temps et des influences des uns et des autres.
La CGT n’œuvre pas de la sorte. Fidèle aux statuts de la CGT, elle défend les intérêts collectifs professionnels des salariés, avec responsabilité et connaissance de l’entreprise et de son histoire.